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La Flamme du Canigou

Le feu a toujours été un symbole dans l'histoire de l'homme et a toujours été vénéré en cultes et célébrations. Une de ces célébrations ancestrales est le feu de la Saint Jean, où se fête la nuit la plus courte de l'année au moment du solstice d'été.

Le feu de la Saint Jean et la Flamme du Canigou

Ces célébrations nous arrivent aujourd'hui avec quelques changements dans leur symbolisme. Au début, il s'agissait d'une fête commune à toute l'Europe alors que maintenant, elle n'est célébrée que dans quelques endroits isolés. On peut dire que notre peuple catalan est l'un des seuls a avoir su conserver toute sa symbolique à cet événement et cela depuis des temps immémoriaux. Malgré les interdictions de différentes époques (guerre civile, etc.), les "focs de la Sant Joan" ont perduré au fil du temps, en revêtant en outre à chaque fois un symbole plus fort de l'identité catalane.

trobada canigouLe dimanche avant la Saint Jean, c'est la "Trobada del Canigó"

Celui qui n'a jamais assisté à la "chenille" des fervents de la Saint Jean sur les flancs du Canigou embrumé, ne peut se faire une idée de son ampleur et de sa simplicité. Voir des centaines de personnes s'étirer le long du sentier menant au Pic peut donner une assez belle image de ce qu'est la Saint Jean réellement. C'est, au-delà de la fête "codifiée" et organisée, l'expression d'une ferveur, d'une âme enracinée par ses traditions ; elle donne aussi à chacun sa propre dimension par rapport à la création collective : que chacun porte ne serait-ce que des brindilles ou un fagot, suffit. Si nous sommes nombreux, le bois au sommet sera important. Tous, dans cette fête, à l'instar de la Trobada, nous apportons notre contribution, même minime. Et c'est pour cela que la "Festa Major" est si belle, parce que construction collective. Chacun s'y retrouve, car c'est une fête différente des fêtes "touristiques".

Cette nuit-là, il n'y a plus ni jeunes ni vieux, ni animateurs ni spectateurs : il n'y a plus que des catalans de cœur vivant ensemble dans le même pays et se réjouissant de ces retrouvailles.

De plus, pour la Trobada, chacun dans le village a mis "la main à la pâte". Le fagot qui sera acheminé au Pic sera celui de la commune : il porte son nom et est exposé aux regards, soit à la mairie, soit dans un lieu passant (boutique ou autre).
Ainsi, au sommet du Canigou, quelle joie d'être représenté, symbolisé par des branchages de son terroir : Vic avoisine Argelès, les Catalans de Paris rejoignant ceux de Barcelone, Figueres côtoie Salses… Les branches sont anonymes, mais portent un nom commun : celui du village. C'est grâce à cela que, lorsque le feu embrasera le sommet du Canigou, la Flamme battra au rythme de tous les cœurs réunis.

La montée au Pic du Canigou

Le 22 juin, trois montagnards du Cercle des jeunes se rendent au Castillet pour prendre en "charge" la Flamme, le llum d'oli de la Casa Pairal. En effet, et ce depuis 1964, elle brûle sans arrêt dans une pièce du musée. C'est à cette date que, pour la première fois, a été allumé "au feu du ciel" la Flamme du Canigou. Depuis, la Flamme ne s'est jamais éteinte et rejoint chaque année, après sa courte nuit, son asile de traditions.
Ils doivent protéger cette Flamme que tous espèrent dans la plaine. "Leur cœur est embrasé de cette flamme d'amour, de cette flamme qui vibre au fond de chacun, comme sous le verre mal clos de la lampe tempête".

La course de la Flamme

La Flamme est alors "régénérée" grâce au formidable brasier allumé au sommet du Canigou à 2784 mètres d'altitude.

Alors, comme en réponse à un signal invisible, ils dévalent en courant les flancs du Pic Roi. Leur mission a commencé avec le lever du jour. Ils arrivent dans la vallée où des dizaines de jeunes gens les attendent, venus de loin : Paris, Strasbourg, Girona, Barcelona, Valence… De main en main, de lampe tempête en lampe tempête, la Flamme vole : elle se transmet et avec elle son cortège d'émotions et d'amour, d'histoire et d'avenir. On est tenté de plagier le proverbe : plus je partage la Flamme, plus elle se multiplie. La gigantesque chaîne des feux commence à forger un à un ses maillons.

Feu sur terre, dans les airs et sur mer

Des pentes rudes de la montagne sacrée vers tous les villages pour embraser de multiples foyers, durant toute la journée du 23 juin, elle court. Rien ne peut l'arrêter. De l'avion à la moto, des chevaux aux coureurs à pied, de la voiture aux vedettes de la douane, elle emprunte tous les moyens mis à sa disposition ; qu'importe le moyen, pourvu qu'elle arrive ! Elle semble donner des ailes et une ferveur nouvelle à ceux qui la transportent : les contingences matérielles s'abolissent et il ne reste plus que son message, celui qu'elle adresse à tous les hommes. Sur terre et sur mer, c'est un immense relais humain qui se transmet la Flamme, une chaîne fraternelle tissée par la bonne volonté de tous pour que cette flamme fragile embrasse dans sa course le cœur de millions d'hommes.

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